11500 ans avant J.C., les chasseurs de mammouths utilisaient leur vision binoculaire pour survivre et contempler les grands espaces. Même après la disparition énigmatique de ces grands mammifères, l’homme a continué à utiliser principalement ses yeux pour se positionner dans l’espace à faible vitesse et ce mode de vie s’est poursuivi peu ou prou pendant des milliers d’années au terme desquelles deux révolutions de masse sont apparues qui ont changé notre monde en 50 ans.
1960 après J.C., le réseau national de télévision s’achève, la première chaine de télévision émet régulièrement sur tout le territoire à peine 7 heures par jour en noir et blanc pour 1% de la population. 70% des ménages ne possèdent pas de voiture et ceux qui en ont une, roulent environ 8 400 km par an. L’homme commence la révolution de sa contrainte visuelle. Période encore marquée par une économie primaire dans laquelle la force (extéroception de la charge) est prépondérante.
2013 après J.C., la télévision et les écrans en tous genres, du plus petit au plus grand, dominent complètement notre temps de vie, les contenus sont diffusés 24h/24h. Quasiment toute la population en âge de conduire est motorisée et parcourt environ 15 000 km par an. La révolution du positionnement dans l’espace a remplacé l’ère de la maîtrise de charge, nous sommes passés à l’ère supra-tertiaire dans laquelle l’œil est la source d’informations dominante de l’organisation de notre vie et de notre mode de pensée.
Quand on pense à cette évolution saisissante de notre activité quotidienne en termes de relation au monde, on ne peut pas considérer que l’on puisse continuer à concevoir l’activité oculaire sur des bases qui ont inspiré Mary Maddox en 1929. La charge de l’activité oculaire, considérée comme naturelle par la jeune génération d’aujourd’hui qui n’en a pas connu d’autre et comme adaptative à l’infini par les anciennes générations, est devenue monstrueuse.